Les recherches dans la Grotte d’Isturitz

29.05.2023

Les recherches dans la grotte d’Isturitz. Une courte synthèse.

La grotte d’Isturitz, un des quatre réseaux de cavité présents dans la colline de Gaztelu, est un des plus importants sites préhistoriques d’Europe.
Les fouilles intensives qui s’y sont déroulées dans la première moitié du XXe siècle, d’abord par Emmanuel Passemard puis par René et Suzanne de Saint-Périer, y ont en effet révélé des occupations humaines quasiment sans interruption pendant plusieurs dizaines de millénaires.

Les travaux archéologiques ont repris en 1996 afin de déterminer si l’intérêt des couches archéologiques encore à fouiller était suffisant pour justifier de nouvelles recherches.
Les résultats ont été particulièrement positifs dans deux secteurs : l’un dans la salle d’Isturitz où un sondage (sondage n°7) réalisé en 1998 sous la direction de Christian Normand a permis la découverte de plusieurs restes de jeune mammouth, dont une scapula, associés à une couche très riche en os brûlés et datée au alentours de 32 000 ans avant le présent ; l’autre dans la salle de Saint-Martin où ont été repérés de riches ensembles attribués à une période appelée l’Aurignacien.

C’est dans ce dernier secteur qu’une fouille a été entreprise en 1999 par une équipe franco-espagnole puis entre 2000 et 2010 par une équipe internationale comprenant une trentaine de spécialistes sous la responsabilité de Christian Normand (alors archéologue au Service régional de l’Archéologie d’Aquitaine). Les multiples vestiges découverts – notamment des dizaines de milliers de silex taillés et de restes de gibier (cheval, bison, renne…) mais également des centaines d’éléments de parure (perles, coquillages…) – attestent que des groupes humains ont occupé intensément la grotte entre 43 et 37 000 ans avant le présent, période qui a vu Homo sapiens s’installer définitivement en Europe occidentale après la disparition des Néandertaliens. Les résultats obtenus sont majeurs et font désormais de la grotte d’Isturitz un site clef pour la compréhension de ce moment fondamental pour notre (pré)histoire. Entre 2011 et 2017 les recherches se sont orientées vers l’étude des œuvres d’art pariétal existant dans cette même grotte mais également dans le réseau d’Oxocelhaya sous la direction de Diego Garate (université de Santander). Outre l’étude des peintures et des gravures, représentant en particulier des chevaux et des cervidés, ces travaux ont permis de repérer de très nombreux marquages de peinture rouge et des os fichés dans des fissures de la paroi. Les différentes données montrent que ces cavités avaient un important rôle au cœur de l’aire pyrénéo-cantabrique il y a 15 000 à 18 000 ans.

Par la suite, le temps de la publication des résultats des recherches précédentes, les opérations ont été axées sur d’autres problématiques :
– fouille en 2015 d’une importante zone funéraire du Néolithique final (vers 2 300/2 100 ans avant notre ère) dans la salle de Saint-Martin avec la découverte de restes dispersés d’une trentaine d’individus (responsable : Patrice Dumontier) ;

– sondage en 2021 dans la même salle. La découverte de coquillages utilisés comme parure y atteste pour la première fois de liens avec la Méditerranée il y a 17 000 ans (responsable : Christian Normand) ; – agrandissement en 2021 du sondage n°7 par une équipe de l’université du Pays basque qui a confirmé et précisé les données acquises en 1998 (responsable : Aritza Villaluenga) ;
– recherches en 2022 dans une troisième salle (celle dite des Phosphates). Y a notamment été déterminée une probable utilisation comme refuge à la fin de l’Antiquité (responsable : Christian Normand).
Cette année, outre la fin de l’opération d’agrandissement du sondage n°7 par la même équipe qu’en 2021, des spécialiste du Department of Evolutionary Anthropology de l’université de Vienne (Autriche) viendront faire des prélèvements de sédiments dans l’une des coupes dégagées lors des fouilles 2000- 2021 afin d’y chercher des ADN humains. Leur séquençage aura comme objectif de définir précisément l’identité génétique des humains ayant fréquenté alors la grotte (responsable : Christian Normand).
Il est également à noter que plusieurs pièces découvertes lors de ces mêmes fouilles sont présentées dans l’exposition sur l’art préhistorique actuellement au Musée d’Aquitaine à Bordeaux.

Christian Normand, responsable scientifique des grottes d’Isturitz et d’Oxocelhaya

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