François Rossé, compositeur d’Aspaldian

13.12.2012

Flûtes en os de vautour, modèle possibles d'Isturitz

François Rossé, à propos d’aspaldian…

François Rossé« Il est évident de constater à quel point notre époque contemporaine interroge nos origines, peut-être en analogie aux mouvements de pensée de la Renaissance orientant le regard vers l’Antiquité et répondant quelque peu ainsi à l’instabilité provoquée par la fin de siècles de théocratie à la fois oppressante et structurante. Dans le monde moderne, les dieux nouveaux s’installaient peu à peu dans la puissance occidentale industrielle hégémonique qui aujourd’hui est en voie d’effondrement face aux différentes cultures et puissances dispersées sur la planète.
Les engagements artistiques n’échappent guère à ces mouvements et de la planète c’est l’homme entier qui est interrogé très concrètement.
Interroger l’homme, c’est interpeller ses racines, ses origines les plus lointaines. Si l’homme a su fabriquer une flûte à partir d’os de vautour c’est aussi cet os et son vautour qui ont imposé une certaine démarche, un aller-retour dans la nature, nature inhérente à l’homme aussi. Cette flûte est un métissage au niveau biologique, logique vitale qui alterne prédation et partage.
Cette proposition s’ouvre davantage encore vers un métissage avec un bout du ventre de la Terre, cette grotte d’Isturitze, reliant ainsi la biologie à la géologie. Le temps semble ici particulièrement compact, 40 000 années entre ces os percés et le déroulement des séquences électroacoustiques, mais l’homme a t-il vraiment changé en tant d’années ?
Techniques et sagesse sont des concepts bien indépendants en interrogeant les vautours qui ont permis ce jour d’épouser un moment de grand partage. »
François Rossé

François Rossé, parcours :

Autodidacte ayant intégré le conservatoire à 17 ans, il remporte un premier prix du Conservatoire de Strasbourg (piano) et les 1ers prix d’écriture, d’analyse et de composition au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris (classe d’Olivier Messiaen et de Betsy Jolas). François Rossé est aussi lauréat de prestigieux prix tels que le concours national « musique et informatique » présidé par Iannis Xenakis, le Concours International de Composition de la Hochschule der Künste de Berlin, le Prix National de la Sacem 1994 pour l’ensemble de sa production… En 2004, son répertoire se portait à plus de 400 œuvres jouées sur le plan international par des formations réputées.
Des formations classiques aux musiques urbaines, son œuvre et ses expériences sont extrêmement diverses, mettant en confrontation différentes cultures ou environnements sociaux, et son engagement à travers les musiques improvisées ouvre ses rencontres sur des mondes poétiques d’artistes et de disciplines artistiques les plus variées…

Extrait d’un entretien avec François Rossé par ECM+ (Ensemble contemporain Montréal) en 2010. A la question, votre esthétique musicale en quelques mots, François Rossé répondait ceci :
« Après avoir obtenu le diplôme sur épreuve de « Maistre dégustateur d’aligot des buronnies du Cantalès » (l’aligot étant un fromage de la montagne Aubrac dans le Massif central en France) j’ai eu aussi droit à l’intitulé « compositeur écolo-préhistorique » (…)
A vrai dire, plus qu’une esthétique, c’est une démarche que je ne regrette toujours pas d’avoir fait, dès que j’ai quitté les études officielles : cette démarche se résume à la question de savoir comment l’Homme depuis les cavernes préhistoriques a-t-il fait pour dompter les phénomènes sonores pour les exploiter dans ce qui deviendra une culture… des grottes préhistoriques à la 9ème de Beethoven et à nos jours… que s’est-il passé ? Cette question n’est pas innocente elle oblige l’analyse de ce qui appartient à l’humain globalement et de ce qui relève des spécificités culturelles. Aujourd’hui, les confrontations culturelles sont imparables, un créateur ne peut s’y soustraire, il y a donc là une approche qui peut être fertile et qui interpelle aussi la question de l’oralité, car la notion de musique contemporaine d’aujourd’hui (2010) n’est pas exclusivement rivée à l’écriture. La notion de musique peut aussi se conjuguer dans l’oralité il me semble, et dans certaines situations cela est même inévitable actuellement (à moins de s’enfermer dans un protectionnisme exclusivement occidental).

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